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Singularities

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Julie Dao Duy

Par Clémence Lorrieux et Truus Dokter

Le salon Pitti Filati, qui s’est tenu à Florence du 1er au 3 juillet derniers, mettait un fort accent sur le retour à l’artisanat, la connaissance approfondie des couleurs et des matériaux, l’amour de la tradition, et affichait plus généralement une affection évidente pour les matériaux, les couleurs, et tous les processus de création.

Lorsqu’on entre dans la Fortezza da Basso, on comprend immédiatement que quelque chose est en train de changer. Le pavillon extérieur donne un aperçu assez clair du message de la saison, explicitement centrée sur l’artisanat : «  Le mot-clé, c’est le savoir-faire. Sans compétences artisanales, on ne peut pas survivre à l’environnement actuel en perpétuelle mutation, où chaque minute annonce davantage que l’innovation, la qualité, et la beauté inscrite dans le temps, vont remplacer la vitesse, le mal fait et le superficiel. »

Le forum principal nous fait remonter dans le temps, à cette époque où les vêtements abîmés étaient destinés à être réparés, suivant une histoire d’usure naturelle, de reprisage et de racommodage, avant d’être à nouveau portés. Tandis qu’aujourd’hui il n’est pas rare que des vêtements ne servent qu’une fois, le « vécu » leur donnait autrefois de la valeur. Choisir cet angle thématique a permis aux créateurs sur le forum de souligner la distinction entre le jetable, le durable et l’héritable mais aussi entre le luxueux, ce qui a de la valeur et ce qui n’en a pas. Ils pouvaient ainsi mettre en exergue que le cœur de cette nouvelle saison, ça n’est pas la nostalgie, mais bien cette route qui va de l’histoire au contemporain, et engage avec soi tout ce que l’on rencontre le long de ce voyage.

Le thème général du salon était donc totalement en phase avec l’un des quatre thèmes de Peclers pour la saison FW 2016/17 : « Design & Crafts ».

LES SAVOIR-FAIRE COMME SOURCES D’INSPIRATION

Les équipes Peclers ont sélectionné pour vous quelques unes des familles d’artisanat qui ont inspiré le salon.

LE SAVOIR-RACCOMMODER

Cette technique, inspirée par les vêtements de ferme et le denim, est fortement reliée au « boro » japonais, où le raccommodage et l’assemblage de textiles par petites mailles, principalement en bleu et indigo, deviennent de superbes échantillons tricotés. La plupart des échantillons exposés ici assument une filiation directe avec le denim et le workwear, tandis que la composition entre les différentes pièces soigneusement patchées à la main, leur donne un aspect plus sophistiqué et précieux.

Cette inspiration peut être utilisée pour une garde-robe urbaine et sportive, mais en évitant les références directes aux coupes de kimono.

LES COUVERTURES ARTISANALES

La qualité du travail, la patience et la précision requises à la création des couvertures ou des plaids est une source d’inspiration pour le chaîne et trame notamment, mais aussi pour l’ensemble des matériaux. Les compositions graphiques, basées sur des motifs traditionnels apportent cependant un angle moderne par le mélange de l’histoire, de l’artisanat, et des esthétiques contemporaines. Une piste adaptée aux vêtements assez robustes mais faciles à porter, qui laissent l’attention se porter sur les textures et l’aspect graphique.

Les couleurs sont naturelles : des jaunes d’or, rouges chauds orangés, et des accents de bleus et de verts.

L’ART DES CRAQUELURES

Cette technique est inspirée du « kintsugi » ou « réparations dorées », un art japonais qui utilise de la laque saupoudrée d’or pour réparer les poteries cassées.  Elle met l’accent sur l’unicité, créant une véritable œuvre d’art où l’objet cassé qui la compose à d’autant plus de valeur.

Les vêtements prennent des formes rondes, dans des matériaux doux et épais avec de subtils accents ou rendus métalliques. Quant aux couleurs, il s’agit d’ors naturels.

S’INSPIRER DU CHARBON

Bien qu’ils aient connu une large diffusion jusqu’au milieu du vingtième siècle en Italie, la Calabre est sans doute la dernière région où l’on peut encore voir ces travailleurs qui brûlent le charbon et le vendent. Ces « carbonai » servent d’inspiration pour des surfaces traitées par le feu, où différentes textures, mates et brillantes, se combinent avec délicatesse. Le carbonaio moderne semble mélanger le style d’un vagabond à celui d’un aristocrate : les matériaux sont riches, mais laissent toujours voir les signes du temps, des choses abîmées. Pour les couleurs, camaïeus de noirs, de gris, et de verts cendrés.

QUAND LA VIANDE NOURRIT LA CREATION

Le boucher et son savoir-faire, la chair et la texture de la viande, servent d’inspiration à ce thème carné. Analyser la forme, l’anatomie et la matière, mais aussi l’attention et la précision dont il faut s’armer pour bien couper la viande, a servi de point de départ à d’incroyables combinaisons de couleurs, jeux de textures, de reliefs, et embellissements graphiques. Les vêtements sont façonnés en portant une attention particulière à l’anatomie, et en se concentrant sur les drapés organiques et les formes.

Les couleurs vont du rouge au rouge brun, à l’aubergine, avec reflets de blanc et ombres de rose chair.

LE BARBIER COOL

La culture hipster continuant de progresser, on ne saurait faire abstraction du barbier traditionnel parmi cette sélection d’artisans « cool ».

L’inspiration se trouve dans les activités de taille et de soin de la barbe, mais aussi dans le fait de redessiner l’univers masculin à la lumière d’influences puisées chez les gentlemen élégants du passé, et dans la robustesse virile.

Les couleurs sont principalement naturelles, avec des touches de vert et d’ambre, et des pointes de couleurs militaires assourdies.

DU CôTÉ DES MATIÈRES

D’un point de vue plus technique, les stylistes Peclers ont aussi rencontré les filateurs présents sur le salon pour s’enquérir des dernières tendances matières.

LE MOHAIR

La majorité d’entre eux délaissent les fibres d’angora au profit du mohair, la demande des acteurs majeurs du marché s’étant arrêtée suite à une campagne lancée à l’automne 2013 dénonçant les conditions de production de cette fourrure. Désormais, quelques filatures intègrent une dimension durable, éthique et respectueuse à leur processus de fabrication et proposent quelques fils eco friendly, eco wool.

Les fibres gardées plus ou moins longues sont twistées à des fils plus secs, brillants et contrastés tels que la soie ou la viscose, créant des effets chinés poilus et lumineux.

LES AUTHENTIQUES

Une grande présence de d’alpaga, mélangé ou fantaisie, chiné, mousseux, bouclé…

Mélangé à des fibres synthétiques telles que le polyamide ou l’acrylique, il permet de créer une très belle main et une qualité très accessible.

Focus sur les esprits shetlands et couvertures, les bruts sophistiqués, mélanges de laine vierge ou de yak et de cachemire.

 

 LES VISCOSES ET SOIES D’HIVER

Les viscoses se transforment avec une nouvelle main très chaude et deviennent douillettes. On note les mélanges de viscose et laine mérinos ou encore viscose, laine et cachemire.

La soie se mélange à des fils plus rustiques ou authentiques, en moyens et gros titrages bruts mais lumineux.

 

LA LAINE MERINOS

L’essentielle et classique laine mérinos offre de nouvelles possibilités : de nouveaux processus de fabrication rendent la fibre extra fine et créent une main similaire à du cachemire. Les filateurs proposent de nouveaux traitements, la rendant lavable en machine, anti-rétrécissante, imperméable…

LES FILS : WHAT'S NEW?

La fantaisie s’invite chez les filateurs cette saison, jusque dans les fils et mélanges les plus classiques ou luxueux. Ils s’impriment, se mélangent, jouent avec les irrégularités…

On note beaucoup de moyens et gros titrages.

On enrichit les matières et on renouvelle les classiques par des techniques et des effets brushed, needled, bouilli, feutré…

Les effets de fourrures :

– Les bouclés esprit astrakan, bouclés mélangés avec un fil imprimé

– Les fourrures flammées, les effets mousseux, poilus, pelucheux

– Les bouclettes ultra légères en soie mohair

Les fils tweedés :

Les nouveau tweeds poilus, en chaînette multicolore ou avec une base de laine et boutons de soie ou viscose colorés

Les fils chaînettes :

Chinés, mélangés, moulinés, dégradés…

On retient les très gros et maxi titrages précieux, en mélanges d’alpaga ou soie et mohair et cachemire soie

Les très gros fils ronds :

Les nouveaux poids ultra light, à l’intérieur ouatiné de laine

 

COUP DE COEUR PECLERS

Le cachemire mongolien Fair par Maiyet & Botto Giuseppe. Développement du seul cachemire respectueux, éthique et durable, utilisant des teintures naturelles et l’énergie renouvelable pour leur processus de fabrication.